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FESPACO 2023 : Hervé Eric Lengani veut aller « de plus en plus loin »

Publié le mercredi 8 février 2023 à 22h30min

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FESPACO 2023 : Hervé Eric Lengani veut aller « de plus en plus loin »

Hervé Eric Lengani est sans doute l’un des réalisateurs les plus doués et les plus prolixes de sa génération. De ses débuts en tant que comédien dans les séries à succès, « A nous la vie » et les « Jeunes branchés », jusqu’à nos jours, le petit « Bissa » a fait du chemin derrière la caméra. Assistant-réalisateur, réalisateur ou producteur, Hervé Eric Lengani compte dans son escarcelle plusieurs documentaires et films. « De plus en plus loin », le thriller social qu’il a co-réalisé avec Fabien Dao, est en compétition officielle au FESPACO 2023. Re-découvrons l’homme à travers cet entretien réalisé en ligne fin janvier 2023.

Lefaso.net : De nombreux Burkinabè vous ont découvert à travers les séries “A nous la vie” et les “jeunes branchés” à la fin des années 90 et au début des années 2000. Comment êtes-vous arrivé au cinéma ?

Hervé Eric Lengani : Je suis arrivé au cinéma de façon fortuite. Il y avait le casting de la série « A nous la vie » et l’université était inondée d’affiches car les étudiants étaient la cible principale. Je suis allé par simple curiosité et sur plus de quatre cent jeunes, j’ai eu la chance d’être retenu. Nous étions huit pour les rôles principaux.

Quelles sont les personnes qui vous ont inspiré à vos débuts ?

Oui, il y a énormément de gens qui m’ont servi de boussole, de mentor et de modèles. Il y a entre autres Abdoulaye Dao, Dani Kouyaté, Issa Traoré De Brahima, Guy-Désiré Yaméogo, Serge Henry... La liste est loin d’être exhaustive. Je continue de travailler avec beaucoup d’entre eux. Nous collaborons sur un certain nombre de projets.

Comment ont réagi vos proches, lorsque vous avez décidé de vous consacrer au cinéma, quand on sait que vous avez fait des études en communication ?

J’ai la chance d’avoir des parents très compréhensifs. Jamais, ils ne m’ont posé une question sur mon choix. Ils respectent et tout va bien.

Après avoir été plusieurs fois assistant réalisateur sur des films tels que “Ouaga Saga”, “Vis-à-vis”, “L’or blanc”, “J’existe”, “Humanitaire”… vous rejoignez en 2007 les Studios 225 Productions à Abidjan. Pourquoi avoir pris le large en Côte d’Ivoire qui traversait à l’époque une crise socio-politique ?

A l’époque, deux jeunes producteurs (un Français et un Ivoirien) ambitionnaient de mettre sur pied un nouveau modèle économique du cinéma. Il s’agissait de rentrer dans un schéma où les productions arrivaient à une certaine autosuffisance. Un film devait être à mesure de financer la production du prochain et ainsi de suite. On a tenu jusqu’à ce que survienne la crise post-électorale en Côte D’Ivoire. Il faudrait souligner que nous avions réussi la prouesse de faire signer des exclusivités avec des comédiens de renom tels que Gohou Michel, Bohiri, Digbeu, Abass, Nastou, Oupoh, Marie-Laure (paix à son âme). Pour moi c’était un challenge et lorsque j’ai été contacté, je n’ai pas beaucoup hésité.

A Abidjan, en 2008 vous sortez votre premier film en tant que “réalisateur plein”. Sauf omission ou erreur, il s’agit du long métrage “Dieu est avec nous”. Parlez-nous de cette première expérience en tant que réalisateur et des difficultés rencontrées.

Mon premier long métrage en Côte d’Ivoire c’est « Dago Serry ». J’avoue qu’au début ce n’était pas facile car, se retrouver à diriger de grands acteurs aux renommées internationales n’est pas simple. Mais heureusement, ils sont restés professionnels. Les techniciens étaient aussi motivés et c’était un pur bonheur toutes les fois que nous commencions un nouveau projet.

Après ce film, vous enchaînez avec les films « La famille Sékouba », « Destin croisé d’une vie », « Cour commune », « Marco Clara », co-réalisé avec Zadito Jonas, « Coco Beach », « Lago le terrible », « la femme de mon patron », et les séries « Abass et Marie Laure », « Brigade très spéciale ». Et en 2010, vous quittez les Studios 225. Que retenez-vous de votre passage dans cette maison de production ?

Cette aventure avec les Studios 225 marque un tournant décisif dans ma carrière. J’ai eu l’opportunité de travailler avec des sommités et j’ai été en compétition officielle pour la première fois en 2009 au FESPACO en série télé avec « Cour commune » qui, la même année, a été mention spéciale du jury à Vues d’Afrique au Canada.

De retour au bercail, vous avez travaillé sur plusieurs projets en tant qu’assistant-réalisateur et réalisateur de plusieurs documentaires. En regardant aujourd’hui dans le rétroviseur, quelle comparaison faites-vous entre les cinémas ivoirien et burkinabè ?

Je ne fais pas de comparaison entre cinéma soit dit « ivoirien ou burkinabè ». Vous savez, rien ne se fait en dehors du temps et de l’espace. Tout ce que nous faisons est influencé par cette donne. Ainsi, les Ivoiriens parlent d’eux, de leur culture, de leur ambition, de leur vision dans leurs œuvres tout comme les Burkinabè.

Hervé Eric Lengani sur un plateau de tournage

Après Duga, les charognards que vous avez co-réalisé avec le Burkinabè Abdoulaye Dao et qui a remporté le prix Signis et le prix de l’UEMOA au FESPACO en 2019, vous êtes de retour avec la série « De plus en plus loin » que vous avez réalisé avec Fabien Dao. Comment s’est passée la collaboration avec les créateurs de cette série, Michel Bohiri et Adiaratou Sangaré ?

J’avais déjà beaucoup travaillé avec Michel Bohiri que j’apprécie énormément. Le producteur m’a découvert grace à « DUGA ». Certes les conditions de tournage étaient assez spartiates mais dans l’ensemble, c’était une très belle expérience que je renouvellerais avec plaisir.

Personnellement qu’évoque le thème de la migration pour vous qui êtes originaire d’une région (Centre-est) du Burkina où partir est la règle et rester l’exception ?

Comme dans toute activité humaine il y a du bon et du mauvais dans ce que nous faisons. Dans ma région, lorsqu’on vous parle des investissements et des apports de capitaux que génère, l’immigration, on est tenté dire que c’est une solution face à la pauvreté. D’un autre côté aussi lorsqu’on voit les risques qu’ils prennent pour la traversée, on se demande souvent si ça en vaut la peine. Personnellement, je ne conseille à personne de tenter l’aventure tant qu’elle n’aura pas tout essayé au pays.

Est-ce que vous vous définissez comme un réalisateur engagé ?

Souvent, je me demande ce que renferme le mot « engagé ». Moi, je fais des films, j’aborde des sujets qui parfois sont sensibles. Le but premier, c’est d’abord de raconter une histoire et chacun puise ce qu’il veut à l’intérieur.

Un mot sur la participation des Burkinabè au FESPACO. Y a-t-il des motifs d’espoir pour que le Burkina soulève le troisième Étalon de Yennenga de son histoire ?

On n’organise pas un festival pour le perdre. Donc nous avons notre chance.

Un mot de fin ?

Bravo à votre organe qui est la doyenne des presses en ligne au Burkina. Nous espérons que les nouvelles autorités vont nous aider à mieux assainir et organiser notre métier car nous sommes très souvent incompris. On espère qu’avec la mise en place du secrétariat technique du Centre national de la cinématographie et de l’audiovisuel (ST-CNCA), les cinéastes pourront travailler dans de meilleures conditions.

Propos recueillis par Fredo Bassolé
Lefaso.net

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