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Ressources naturelles en Afrique : Essayons d’être logiques !

Publié le mardi 25 octobre 2022 à 17h00min

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Ressources naturelles en Afrique : Essayons d’être logiques !

Le pillage de nos ressources n’est pas possible sans complicités internes. C’est la conclusion à laquelle parvient l’écrivain et journaliste Sayouba Traoré après avoir montré en quoi certains responsables aident à brader les ressources naturelles de leurs pays.

Un pays africain a du minerai précieux dans son sous-sol. Comment faire pour valoriser ce minerai, quand on sait que son propre niveau de développement technologique ne permet pas d’exploiter soi-même ? Qu’est-ce que ce pays peut faire de ce gisement, quand on voit bien que son niveau de développement économique ne lui permet pas d’utiliser ce minerai ? Ces questions ne sont pas à négliger. Parce que l’économie, c’est à prendre au sérieux. La vie de millions de gens en dépend.

Ce n’est pas un scénario de journaliste. Des pays africains ont dans leur sous-sol de l’uranium. De vous à moi, qu’est-ce qu’un pays sous-développé peut bien faire d’une ressource comme l’uranium ? Si vous répondez à cette question, vous saisissez globalement le problème.

Ce pays africain doit trouver les moyens de vendre ce minerai. Et c’est là que les choses se compliquent. A qui vendre ? A quel prix ? Et comment gérer cet argent ? Cela paraît évident, mais il ne faut pas se flatter. Tout le monde ne peut pas répondre à ces petites questions. Restez tranquille dans votre chaise et essayez seulement ! Vous verrez que ce n’est pas simple.

Les spécialistes parlent de mieux-disant. Je vais tenter de vous dire ce que j’ai compris. C’est-à-dire que Etat étranger, société multinationale, ou consortium de gens intéressés, vous devez choisir celui qui fait la meilleure offre. Je ne vous ai pas caché que l’affaire là n’est pas facile. A ce niveau, il faut déterminer c’est quoi une meilleure offre.

Ce que moi je vois, c’est celui qui propose le plus haut prix à l’achat, celui qui propose une technique d’exploitation qui ne va pas saccager votre environnement, celui qui va construire et vous céder des équipements, celui qui couple son offre avec un transfert de technologie. Transfert de technologie, ça veut dire que l’acheteur doit apprendre à vos travailleurs les nouvelles techniques utilisées.
Voilà donc un pays africain qui a une richesse. Ce pays africain a déniché et sélectionné le partenaire qui convient à ses projets. On peut dire que ce pays a de la chance. N’oublions pas, cependant, que ce sont des humains qui vont négocier avec le partenaire étranger.

Si le Burkina Faso vous désigne pour aller négocier avec un partenaire économique, c’est quoi votre mission ? Vous devez obtenir le plus d’avantages possible dans cette négociation. Une multinationale ou un pays étranger fera pareil. Il va chercher à gagner sur vous. Des centaines de commerçants font la même opération chaque jour à Rood-Woko.

Nous avons dit que ce sont des humains. Une multinationale ou un pays va chercher à connaître les faiblesses des gens chargés de négocier au nom de ce pays africain. Et il va tout tenter. Dessous-de-table. Avez-vous déjà entendu ce terme bizarre ? C’est trivial. Ce sont des avantages que la multinationale va offrir aux négociateurs, contre leur signature. Evidemment, ces dessous-de-table ne vont pas figurer dans le contrat.

Vous avez trahi votre pays et vous avez accepté des dessous-de-table. Vous venez de mettre le pied pile là où il ne faut pas. Parce que dans l’exécution du contrat d’exploitation, vous ne pouvez plus être exigeant. Et la multinationale sait que vous êtes disposé à empocher d’autres dessous-de-table. Cette multinationale est là pour faire du bénéfice. Ce n’est pas de la philanthropie ou autres gentillesses. Ses dirigeants ne sont pas des bonnes sœurs ou des assistantes sociales.

Ne me dites pas que ça n’existe pas. Des procès encombrent les tribunaux. « Mani pulite », vous avez déjà entendu ces mots ? C’est un terme italien qui signifie « mains propres ». Mani pulite, ce sont des juges courageux qui ont ébranlé toute la classe politique, tout le monde des affaires, et bien d’autres secteurs en Italie. Tapez seulement Silvio Berlusconi sur un moteur de recherche et vous serez surpris. Dans son discours de 23 heures en novembre 2021, le Président Roch Kaboré a parlé d’opération « mains propres ». Et j’ai dit à des amis que le président vient de signer son arrêt de mort.

Notre affaire n’est pas terminée. Le contrat est signé. L’exploitation a commencé. L’argent rentre. Mais aucun citoyen ne voit la couleur de cet argent. Cet argent n’arrive pas non plus dans les caisses de l’Etat. Les révoltes sont incessantes au Nigeria, parce que personne ne sait où rentre l’argent du pétrole. Aujourd’hui, des jeunes sont organisés en gangs et détournent directement 25% du pétrole brut des installations de la société Shell. Je peux multiplier les exemples de ce genre.

En résumé, il faut retenir quoi ? Le pillage de nos ressources n’est pas possible sans complicités internes. Ce n’est pas parce que moi je le dis. Ce sont les mécanismes internationaux de l’économie mondiale qui le veulent. Et c’est quelque chose que toute personne de bonne foi peut constater. Et si vous êtes de mauvaise foi, vous avez perdu votre temps pour lire cet article. Et on ne peut vraiment rien pour vous. Un être vivant doit respirer pour vivre. On fait du commerce pour gagner de l’argent. Tant pis pour nous, si nous avons oublié les intérêts de notre pays. Si votre esprit ne peut pas accepter cela, allez chercher des lectures ailleurs !

Ce que je sais de façon certaine, c’est que nous ne pourrons pas résoudre nos problèmes en distillant des mensonges. Des demi-vérités non plus ne feront pas l’affaire. Chacun doit prendre un miroir et se regarder en face. Si vous avez peur du miroir, vous avez un problème. Un sérieux problème ! On vole notre propre pays. Et ce pays est obligé de solliciter l’aide internationale. Nous refusons de payer des impôts. Avec quoi le gouvernement va travailler ? C’est ces termes que la question se pose aujourd’hui. Et des citoyens honnêtes ne peuvent pas esquiver cette réalité. Quelle que soit votre religion, quelle que soit votre idéologie, 1+1, ce sera toujours égal à 2. Si c’est égal à 3, vous avez un problème. Un vrai problème avec vous-même.

Sayouba TRAORE
Ecrivain-Journaliste

Dans nos pays africains, est-ce que ce sont des gens qui ont quitté la forêt amazonienne pour venir signer les contrats pour nous ? Est-ce que des Zimbawéens sont venus négocier et signer les contrats pour nous au Burkina Faso ? Est-ce que des gens ont quitté le Kamtchaka pour venir suivre l’exécution de ces contrats dans nos ministères à Ouaga 2000 ?

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Vos commentaires

  • Le 25 octobre 2022 à 14:17, par Bonus En réponse à : Ressources naturelles en Afrique : Essayons d’être logiques !

    Merci grand frere. Les gens se plaignent de cette apatridie. Mais une fois arrive au pouvoir, ils font pire que leurs predecesseurs. C’est un cercle vicieux que nous vivons. Ceux qui volent disent qu’ils preparent leur avenir et ceux de leurs enfants. Alors qu’en volant, on detruit l’avenir du pays et personne n’a d’avenir dans un pays qui n’a pas d’avenir.

  • Le 25 octobre 2022 à 14:24, par Passakziri En réponse à : Ressources naturelles en Afrique : Essayons d’être logiques !

    Vous avez reflété des vérités mais certains refuseront de voir la réalité, pourtant elle est là implaccable. Les possibles solutions sont aussi contenu dans cet article :
    - Lutte contre la corruption . pas la corruption des autres seulement , mais la corruption de tout le monde, parce que celui qui grimpe poing lévé sur le monument Thomas Sankara pour un Selfie et se retrouve à payer 2000F à un agent public à mojns de 300 m de là, on ne peut pas l’aider .
    - Le transfert de compétences, de know-how qui permettrait au pays qui ne sait que faire de son uranium aujourd’hui si ce n’est le vendre au plus offrant, de disposer demain ( à définir quand demain est ) de centrale nucléaire lui permettant d’atteindre une autonomie énergetique ( sans laquelle l’industrialisation restera moribonde). Ce transfert de compétences est impossible sans la lutte sans détails contre la corruption, parce que dans le cas contraire les pots de vin font le reste.
    - Enfin la stabilité politique ( quelle qu’en soit la forme de gouvernance) sans laquelle les investisseurs ne se bousuleront pas, et la loi du marché nous fait comprendre que moins il y’a d’intéressés , plus la marge de manoeuvre de nos pays sera sérrée, cntrairement à une certaine opinion qui laisse penser que le Burkina peut aller chercher ses partenaires ,et venir leur imposer son vouloir en discutant d’"égal à égal" tout en étant en position de faiblesse.
    Le tout couronné par une règlementation claire et à l’avantage de nos pays.

    Pasakziri

  • Le 25 octobre 2022 à 16:09, par Zouk En réponse à : Ressources naturelles en Afrique : Essayons d’être logiques !

    Des vérités à lire, à entendre pour remettre de l’ordre dans les esprits.

  • Le 25 octobre 2022 à 16:39, par Alexio En réponse à : Ressources naturelles en Afrique : Essayons d’être logiques !

    Letat burkinabe doit faire des investifations en remontant jusqu au regime de Blaise Compaerore qui a depecer les societes d Etat par des sommes forfaitaires appelees symbolique souvent a pleure les larmes de sang pour leurs acquisitions a tierces personnes non-ationales. Bollore est un exemple patent.

    ce tyoe avait fortune en Afrique par la corruption et le traffic d influence de lElysee qu il financait les elections des locateurs respectifs. Sarkosy, Hollande ont tous beneficier de ses largesses.

    Les pots- de- vins alloues aux negociants de ses genres de contrats sont payes dans soit dans les paradis fiscaux ou soit les societes ecran montees pour la circonstance.

    Les Ministres des affaires Etrangeres et les Ministres du Commerce sous Blaise Compaore et Rock Marc Kabore meritent une investigation de routine. Surtout le Franc-macon Djibril Bassolet avec ses ramifications avec les Emirats arabes etant devenus un marche important de l Or.

    Encore que ses pays sont les parrains du terrorisme pour favoriser le traffic illegal de ses metaux precieux que le Burkina Fraso produisent.

    C est une hypothese a dissequer eventuellement. Ma question est ; A qui profite le crime ? Quel role de l operation Sabre au Burkina Faso ?

  • Le 25 octobre 2022 à 20:36, par Alph@2025 En réponse à : Ressources naturelles en Afrique : Essayons d’être logiques !

    Voilà un écrit qui est limpide et clair comme de l’eau de roche. Nos parents au lieu de lutter pour le Faso, offrent nos ressources moyennant des miettes. Et comme ça nous concerne nous, ceux qui ont l’habitude de donner de la voix, enflamment la toile et occupent l’espace public sont du coup bien silencieux. Et pourtant il y a matière à agir. Un ministre de ce pays a construit dans son village, une résidence que ses revenus ne peuvent pas lui offrir. Interrogé par l’ASCE, il n’a pas été en mesure de justifier les fonds ayant servi à construire cette villa. Y a t’il eu un procès contre lui ? que non. Le contrat liant notre pays à SITARAIL est jugé léonin par beaucoup. Est-il dénoncé ? Non. Pourtant, en France, une ONG de droit français a intenté une action en justice contre BOLLORE (actionnaire majoritaire de SITARAIL), pour des faits de corruption commis au TOGO. Pour éviter l’humiliation d’un procès, BOLLORE a du reconnaitre sa culpabilité. C’est la preuve que quand on est déterminé, aucune citadelle n’est imprenable. Dans notre pays, un autre scandale, celui du "charbon fin", peine à connaitre un épilogue. De façon générale, nous ne tirons pas vraiment parti de nos ressources minières. Nous ne détenons que 10 % de participation dans les sociétés minières. Quand aux volumes produits, nous nous contentons des chiffres communiqués par les sociétés, que nous sommes incapables de vérifier. Le raffinage de l’or se fait hors du pays, et là encore nous nous contentons des chiffres que l’on nous communiques. Pourtant, les bons exemples existent, en Afrique. Au Botswana, pays producteur de diamant, toute la chaine de production est locale, y compris les phases finales de raffinage du diamant. Résultat : le Botswana est devenu une place diamantifère, et fixe le prix de son diamant, alors que nous nous contentons nous, de suivre le cours de l’or sur lequel nous n’avons aucune prise. Ce pays tire pleinement parti de sa ressource diamantifère, et celle ci est exploitée au profit de la population. Résultat, ce pays a un PIB qui égale celui du Portugal. Qui parle du Botswana ? Personne. en effet, on ne parle pas des trains qui arrivent à l’heure. Voilà un thème qui rapportera à notre pays, bien plus que la réforme de la monnaie qui empêche certains de dormir. Mais nous n’avons pas le sens des priorités. Nous faisons du spectacle, du sensationnel. Nous n’allons pas à l’essentiel. Sommes vraiment capables de définir ce qui est essentiel pour nous ?

  • Le 26 octobre 2022 à 05:03, par Yal En réponse à : Ressources naturelles en Afrique : Essayons d’être logiques !

    C’est ce que je répète depuis des années sans me faire comprendre même par des intellectuels. La route mal faite de mon quartier à qui la faute ? C’est d’autant plus terrible que l’individu qui rejette la cause de ses déboires sur autrui n’est pas sur la voie de résoudre ses problèmes. Nous sommes innocents les autres sont coupables et on est heureux. Pauvre Afrique !!!

    • Le 26 octobre 2022 à 10:21, par kwiliga En réponse à : Ressources naturelles en Afrique : Essayons d’être logiques !

      Merci beaucoup Sayouba Traoré,
      Et merci à tous les intervenants précédents. Pour une fois, l’on aborde sans concession le fond de tous nos problèmes et je suis ravi de me sentir autant en harmonie avec tous ces commentaires.
      Je me dois malheureusement d’être réaliste et de faire un parallèle avec un article que j’ai lu plus haut et qui nous explique que : "L’Autorité supérieure de contrôle d’Etat et de lutte contre la corruption (ASCE-LC) tient ce mardi 25 octobre 2022 à Ouagadougou un atelier de validation de la stratégie nationale de prévention et de lutte contre la corruption. L’adoption de cette stratégie contribuera à réduire « significativement » la corruption." Et donc, que depuis 40 ans que la corruption pourrit ce pays, on en est à se réunir, pour se concerter, dans l’objectif de valider une stratégie,... un peu comme si la loi n’existait pas déjà, comme si les évidences de corruption, de détournements,... n’étaient pas horriblement flagrantes.
      Ha, c’est pas arrivé dèh !

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