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Commerce international : "Le Burkina Faso doit protéger son agriculture et ses agriculteurs"

Publié le lundi 19 janvier 2004 à 07h05min

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L’Association pour la taxation des transactions financières internationales et d’aide aux citoyens (ATTAC-Burkina) a organisé le 15 janvier 2004 à l’Université de Ouagadougou, une conférence publique. Animée par le Père Maurice Oudet du Service d’édition en langues nationales (SEDELAN), cette conférence avait pour thème : "Le poids du commerce international sur les paysans africains".

Pour rendre plus explicite le thème de la conférence, Maurice Oudet commence par présenter deux photos. L’une est celle qu’affiche la Une d’un ouvrage dont il est lui-même l’auteur et l’autre est celle de la Une du journal Sidwaya du 15 janvier 2004. Les deux images montrent des sacs de riz commercialisé sur le marché intérieur du Burkina et qui pourtant, ne sont pas produits au Burkina Faso. A partir de ces deux images présentant respectivement des sacs de riz parfumé thaïlandais et de longs grains américains, le conférencier a montré l’impact de ces produits sur la vente par exemple, du riz du Sourou ou de Bagré. Bien qu’importés, ces riz sont moins chers sur le marché burkinabè que celui produit par des paysans burkinabè. Cela s’explique par le fait que ces riz sont fortement subventionnés et leurs producteurs peuvent se permettre de les brader au-dessous des coûts de production.

A titre d’exemple, "en France, dit-il, un producteur de blé tire plus de la moitié de ses revenus de subventions ! Il peut donc brader son blé sur le marché mondial et le déverser dans les pays du Sud".

Cette pratique décourage selon lui, la plupart des producteurs africains et entrave la lutte contre la pauvreté. Au moment où les producteurs de Niansan par exemple, ont des difficultés à écouler près de 1 100 tonnes de riz, leurs collègues chinois, thaïlandais et autres américains vendent avec facilité leur riz dans les villes et campagnes burkinabè. Une situation qui s’explique, selon le Père Maurice Oudet, par une politique nationale qui a toujours favorisé la ville aux dépens des zones rurales. "Alors que tous les pays développés ont protégé (et protègent encore) leurs agricultures, le Burkina Faso, comme bien d’autres pays africains, a toujours cherché à nourrir ses populations urbaines au moindre coût. Et donc, le Burkina Faso laisse entrer, entre autres, le riz et le blé (fortement subventionnés) sans taxes significatives", constate Maurice Oudet. Or, les populations urbaines constituent le premier débouché des producteurs agricoles.

Nécessité de récupérer le débouché naturel

"Si les agriculteurs du Sud ne récupèrent pas leur "débouché naturel", leurs populations urbaines, alors ils sont condamnés à la misère". Pour le conférencier, étant donné que les pays du Nord n’accepteront jamais de supprimer tout soutien interne à leurs agriculteurs, il est alors important de reconnaître que la protection à l’importation constitue la forme de soutien la plus solidaire pour les produits agroalimentaires de base dans tous les pays. La protection à l’importation permettra aux agriculteurs de gagner au moins le marché intérieur.

"Il n’y a pas d’avenir pour le Burkina s’il ne fait pas reconnaître son droit à protéger son agriculture par des taxes à l’importation sur les produits agroalimentaires de base", estime le Père Oudet. Il soutient par ailleurs, que le problème majeur des paysans réside dans le marché intérieur et non dans celui extérieur. D’où la nécessité d’offrir des prix rémunérateurs et stables aux produits agricoles. Tel est, à son avis, la voie de développement du monde rural.

Le conférencier a aussi abordé la question des négociations de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) à Cancun au Mexique. Il a relevé que le sommet a été un échec pour les négociations mais aussi une victoire pour les pays du Sud. "Car, dit-il, les pays du Sud ont réussi pour la première fois, à dire non au système commercial". Le Père Oudet a conclu que ce contexte de mondialisation exige le regroupement des pays du Sud, la reconnaissance du droit de souveraineté alimentaire de chaque pays, l’interdiction d’exporter un produit agricole au-dessous des coûts de production.

Enok KINDO
Sidwaya

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