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Présidentielle : Autopsie d’une victoire

Publié le samedi 26 novembre 2005 à 08h57min

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Longtemps encore, sous les tropiques, on dissertera sur le phénomène des élections quelles qu’elles soient : le corps électoral se prononce-t-il en fonction des options idéologiques, des programmes politiques ou des personnes ?

Le premier jury de la grande kermesse électorale a livré son verdict le 18 dernier : 80.30 % des suffrages exprimés pour le candidat sortant Blaise Compaoré. Provisoires, certes, ces résultats tendent à prouver le pouvoir de conviction d’un homme qui aura jeté tout le poids de sa popularité dans la campagne, auprès des populations rurales surtout.

Il n’est pas étonnant de constater certaines contestations qu’on dirait « pour le principe ». Du reste, cet esprit polémique, fermement soutenu par une forte tentation théorisante, est l’une des caractéristiques du Burkinabè. Et l’adversité perçue présentement semble beaucoup plus passionnelle que raisonnée.

Comment en est-on arrivé à cette victoire de Compaoré dès le premier tour ? C’est la grande question qui alimente tous les « Parlements officieux » du pays et pour laquelle l’homme de la rue aurait sa petite idée : d’abord le candidat sortant a réussi la prouesse de rassembler sous une même bannière la volonté hétéroclite de tous ceux-là qui, à un titre ou à un autre, préféraient la tranquillité à l’aventure, tout changement étant une nouvelle aventure pleine d’incertitudes.

On souligne en effet que de nombreux Burkinabè, même militants au sein de partis de l’opposition, restent redevables à ’’l’ancien-nouveau’’ président et lui manifestent parfois toute leur reconnaissance... Plus simple mais pleine de bon sens était cette réflexion qu’on pouvait entendre au cours de la campagne : « Au Faso au moins les fonctionnaires sont payés régulièrement », un fait incontestable ; la « pause-brochettes » est une réalité, un rituel qui ne souffrirait pas de changement.

Certains candidats ne l’ont pas compris qui ont abreuvé l’opinion de discours fortement réducteurs. On se demande réellement s’ils avaient mal mesuré ou purement ignoré l’enjeu en cause : en attendant la lune qu’on leur a promise, les Burkinabè ont préféré garder la petite étoile qu’ils avaient sous la main.
La quasitotale liberté d’expression aura, elle aussi, apporté sa petite pierre à l’édification de la victoire de Blaise Compaoré. En effet, tout ce que des partis de l’opposition ont considéré comme les défauts de son régime sont apparus au grand jour.

Avérés ou non, ils ont été cités dans des discours, insupportables pour les uns, compréhensibles pour d’autres qui relèvent que la critique reste facile. Et d’exposer des actes douloureux que connaît le pays sous la Révolution dite populaire.
Depuis, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts du Faso, et il est bien loin le temps où l’on gouvernait à coups de slogans et de harangues.

Cela, chacun sait à qui on le doit. Ces mêmes supporters affirment du reste que les erreurs, les échecs quotidiens sont autant d’éléments qui, dans les meilleurs des cas, peuvent permettre aux dirigeants de mesurer les limites de leur grandeur et de leur compétence. Les ombres dans le passé de l’histoire n’entravent en rien la marche du monde, le droit au rêve, pour chacun, de voir s’ouvrir un avenir meilleur.

L’environnement politique sous-régional aura également contribué au succès du candidat du parti majoritaire ; Ouagadougou serait quasiment plébiscité lorsqu’il s’agit de désigner un lieu de rencontres au niveau régional, voire international. Ce coup de cur aura été ressenti à travers la présence, au Faso, d’’’amis’’ de la sous-région.

Au-delà de tout ce que l’on pourrait reprocher à la campagne électorale - et les sujets ne manquent pas -, ce qui aura été le plus frappant demeure le soutien de l’ADF-RDA à Blaise Compaoré. Qualifié à l’époque de ’’vilain coup de théâtre’’, le phénomène a largement contribué à asseoir une victoire certaine, quoiqu’il suscite des interrogations par son ambiguïté. A entendre cependant certains observateurs, il n’en serait rien.

Le soutien serait parti d’un constat suivi d’une approche très visionnaire : ayant toujours inscrit la paix sur ses tablettes, le RDA, dit-on, a toujours recherché l’équilibre, ceci depuis sa création en 1946. Plusieurs fois, au Burkina Faso, il en a donné l’exemple, en dépit de certains reproches qu’on pourrait bien lui faire.
D’aucuns avouent que ceux qui ne rêvent que plaies et bosses pour le Faso auront beau jaser, ils ne réussiront jamais à effacer l’acte d’honnêteté qu’a posé l’ADF-RDA.

Que se serait-il passé, disent-ils, si les deux plus grands partis se retrouvaient face à face pour cette élection capitale ? Mieux vaudrait ne pas y songer, touchons du bois... Comme on le voit, le facteur personnalité des postulants à la magistrature suprême aura été prédominant dans cette campagne pour le financement de laquelle on n’a pas fini d’épiloguer, en attendant que la loi vienne y mettre un peu plus d’ordre.

Sauf extraordinaire, le Conseil constitutionnel déclarera le candidat Blaise Compaoré gagnant de la présidentielle du 13 novembre. Il sera proclamé président du Faso, président de tous les Burkinabè sans exclusive.

Pour cela il aura besoin de toutes les ressources que lui procure ce qu’on pourrait appeler la large sympathie pour faire aboutir concrètement ses convictions. De nombreuses forces auront été mises en uvre pour sa victoire, dès le premier tour, une victoire qui a provoqué les réactions et contre-réactions qu’on sait. Souhaitons seulement que ces forces n’échappent pas à ceux qui les auront mises en mouvement.

A. Pazoté

JOurnal du jeudi

P.-S.

Voir notre dossier :
Présidentielle 2005

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