Tôt le matin, des rumeurs d’une éventuelle prise de la télévision nationale par des putschistes prennent de l’ampleur. Un constat s’impose. Nous mettons le cap alors sur la Radiodiffusion et télévision du Burkina avec pour point de départ l’échangeur du nord. Le trajet est libre, fluide mais pas vide et les usagers l’empruntent sans difficulté. Des agents de la police municipale comme à l’accoutumé règlementent la circulation. Mais quelques kilomètres plus loin, la réalité est autre.

A partir du rond-point du 2 Octobre, les choses prennent une autre tournure. On pouvait déjà constater qu’un hélicoptère militaire faisait des rondes au-dessus du camp Guillaume Ouédraogo. A la place de la Nation située à quelques mètres du rond-point du 2 Octobre, il y avait une foule en liesse. Des cris, des klaxons causant un vacarme sans équivoque. Sur place, une cinquantaine de personnes de tout âge crient, chantent et festoient avant même l’annonce d’un coup d’Etat à travers des cris, des klaxons...

Saidou Kaboré

De là, un mot d’ordre est lancé « allons à la RTB ». Terme que l’ensemble des personnes présentes reprirent avec enthousiasme. Cap est alors mis sur la RTB pour écouter et soutenir la déclaration des militaires. Nous suivons la foule.
A la RTB, c’est une ambiance encore plus forte, une foule encore plus immense est déjà regroupée sur place. Elle avoisine désormais la centaine de personne. Les cris sont plus forts et plus retentissants. La joie se lit sur tous les visages et les militaires sont les vedettes du jour. « Les militaires au pouvoir ! Nous on a besoin de nos soldats ! » scandait la foule.

Puis une autre nouvelle tombe, une déclaration est prévue par les militaires à la place de la Nation. Aussitôt, la foule reflue à la place de la Nation en attendant les héros du jour. Il était 10h passé de 40 minutes quand la foule était de retour à la place de la Nation, l’enthousiasme et le soutien des manifestants restent indéfectibles envers les militaires. Ils reprenaient en chœur l’expression « Le pouvoir aux militaires ».

Anaïsse Drabo

Ce « coup de force » est vu par certains comme une renaissance, le début d’une sortie de crise du pays. « On sait que si l’armée prend la situation en main tout sera normal et nous sommes de cœur avec eux » disait un manifestant. « Le peuple en a marre, nous sommes fatigués et nous allons veiller à ce que le pouvoir qui a été pris aujourd’hui revienne au peuple (…) et nous n’allons plus permettre à une tierce personne de venir s’accaparer du pouvoir. Et ne pas faire ce que le peuple veut. Et la lutte ne fait que commencer » disait l’activiste Anaïsse Drabo libérée dans la matinée du lundi 24 janvier 2022.

A notre départ à 13h, la foule était toujours sur place et ce, malgré le soleil ardent. Ce n’est que plus tard dans la soirée que des militaires annonceront avoir pris le pouvoir.

Abdoul Rachid SOW
Erwan COMPAORE
(Stagiaires )
Lefaso.net