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Ciel africain : guerre des bagages et guerre des prix

Publié le vendredi 4 novembre 2005 à 08h07min

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Avis de nouveautés dans le ciel africain . Le duel à distance que se livrent
les compagnies aériennes sur la liaison Afrique-Europe connaît un nouvel
épisode. La dernière en date est le coup d’éclat de la compagnie
internationale française qui a doublé le poids de la franchise bagages.

Rattrapée par la déréglementation au niveau des prix, elle prend une option
sérieuse sur les bagages.

En procédant ainsi, elle transforme son handicap
d’hier en un atout de taille. Reste maintenant à savoir comment les
concurrents africains vont réagir. Le poids des bagages était le principal objet
de désagrément des voyageurs sur les avions occidentaux. Qui n’a jamais vu
un passager délestant sa valise de certains objets qu’il abandonne à
l’aéroport ou à des amis ?

Une scène tragi-comique quand on sait que la
plupart des passagers qui arrivent en Afrique en provenance d’Europe
profitent pour faire des affaires ou ramener des commissions d’immigrés
restés sur place. En cela, le doublement du poids des bagages est un vrai
motif de soulagement.
Quelle sera donc la réaction des Africains ? Les principales compagnies
africaines ont réussi à obtenir une desserte sur Paris ou sur Londres au
forceps, il est vrai.

Leurs tarifs étaient également compétitifs avec en sus un
supplément de kilos. Les compteurs sont donc remis à zéro et leur clientèle
risque d’émigrer sur d’autres vols plus avantageux. Ont-ils les moyens d’offrir
plus ? Et avec quels moyens ?

La question mérite d’être posée quand on connaît les capacités actuelles des
aéronefs. De nouvelles acquisitions seront sans doute nécessaires pour les
compagnies les plus téméraires. En effet, l’embellie actuelle dans le ciel
africain, cache mal l’équilibre fragile du chiffre d’affaires des compagnies
africaines.

Ces dernières sont confrontées ces derniers mois à l’application
stricte des normes de sécurité aérienne. La France a interdit l’atterrissage et
le décollage sur son territoire des avions de cinq compagnies dont deux
africaines, après le crash d’un avion vénézuélien qui avait causé la mort de
153 Français .

Une compagnie d’Afrique centrale vient d’en faire les frais,
même si dans son cas, elle crie à des manoeuvres déloyales.
Pour les usagers africains des avions, les enchères autour du poids des
bagages sont certes bonnes à prendre. Mais par ces temps de crash, il faut
espérer que l’on ne sacrifie sur l’autel de la rentabilité, la sécurité des
passagers.

La rigueur et le professionnalisme des Africains n’ont jamais été
autant sollicités dans ce secteur qu’en 2005. S’ils ont réussi par le jeu des
privatisations partielles, à redonner vie à des compagnies malades, ils ont
désormais l’impérieux devoir de réussir l’intégration africaine dans le ciel :
relier les capitales africaines entre elles à des prix non prohibitifs.
Voyager sur l’Europe coûte bien moins cher que relier deux capitales
africaines.

Un paradoxe qui n’a pourtant rien à voir avec le taux de
remplissage de quelques compagnies qui maintiennent des prix élevés alors
qu’elles pourraient les baisser. Elles s’y essayent certes à travers des cadres
politiques tels l’UEMOA ou la CEDEAO. Mais ce n’est pas suffisant, car les
trafics entre l’Est et l’Ouest africain sont quasi nuls et les politiques ne s’en
préoccupent guère.

Les Etats sans compagnie aérienne gagneraient à signer
des accords de coopération ou de partenariat avec ceux qui en ont, pour
augmenter la fluidité et surtout désenclaver certaines régions. Aujourd’hui,
pour rallier Ouagadougou à Kampala, un détour par l’Europe est presque
obligatoire.

Selon l’association africaine des compagnies aériennes, 70% du trafic aérien
africain sont assurés par de grandes compagnies occidentales, donc
désenclavé par l’Europe. Un paradoxe inacceptable pour des Etats dits
souverains. Mais l’Europe ne compte pas s’arrêter en si bon chemin.

Avec la
déréglementation actuelle, l’Europe ne peut pas se permettre de perdre le
marché africain, même s’il ne représente que 2% du trafic mondial. Le tout est
de savoir que valent ces 2% en espèces sonnantes et trébuchantes.

En effet
dans le cadre du projet de l’espace unique européen, l’Europe veut faire
signer des accords avec les Etats africains afin de permettre à toute
compagnie européenne de desservir à partir de n’importe quel aéroport
européen, un Etat africain. La pression monte. Aux africains de voir où se
trouvent leurs intérêts.

"Le Pays"

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