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Présidentielle 2005 : Attention au score "stalinien"

Publié le lundi 31 octobre 2005 à 08h01min

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Il y a là une confusion, un mélange de style entre le candidat qui veut se succéder à lui-même et le président élu du Faso. Nayab, en tant que candidat à la présidence du Faso, n’a t-il pas les mêmes droits que Blaise Compaoré ? Ram pour son meeting à Bobo peut-il aller s’installer au pied-à-terre du président du Faso ?

Depuis le 21 octobre à minuit le Burkina vibre au rythme de la campagne politique pour la présidentielle du 13 novembre. Tout naturellement ceux qui font le plus de ramdam, c’est le CDP et ses alliés. Ils ont tout, les gadgets les plus inimaginables, les véhicules les plus luxueux et même les airs avec des hélicoptères et une montgolfière.

Avant les débuts de ce théâtre, car la politique sous nos tropiques est purement et simplement du théâtre, le « Manitou" de la campagne de Blaise Compaoré assurait que son camp n’allait pas utiliser les moyens de l’Etat pour battre la campagne. La réalité aujourd’hui lui donne tort. Dans le cortège des véhicules de la campagne de Blaise Compaoré, il y a des fonds rouges mais surtout des fonds blancs qui ne sont en fait que des fonds rouges banalisés. Les moyens de l’Etat se confondent ici entre le président Blaise Compaoré et le candidat Blaise Compaoré. On n’a pas su faire la différence.

Autour du candidat, il y a tous ceux qui le servaient en tant que président élu ; les gardes de corps sont les mêmes qu’avant, les aides de camp, la direction du protocole et quand le candidat Blaise Compaoré se rend dans une localité, il prend ses quartiers au pied-à-terre réservé au président du Faso. Il y a là une confusion, un mélange de style entre le candidat qui veut se succéder à lui-même et le président élu du Faso. Nayab, en tant que candidat à la présidence du Faso, n’a t-il pas les mêmes droits que Blaise Compaoré ?

Ram pour son meeting à Bobo peut-il aller s’installer au pied-à-terre du président du Faso ? Il faut que la CENI explique la conduite à tenir. Car il y a maldonne et visiblement tous les candidats n’ont pas les mêmes chances. On peut accepter qu’ils n’aient pas les mêmes poids car l’élection présidentielle n’est pas un combat de boxe mais un match de football. C’est en boxe qu’on fait la pesée pour mieux catégoriser les pugilistes. Ici on est en football et une fois qu’on a l’âge requis et qu’on remplit le reste des conditions posées par le Conseil constitutionnel, on peut se jeter à l’eau. Mais il faut que l’arbitre veille à ce que tous les joueurs respectent les mêmes règles.

Il ne faut pas qu’à la mi-temps, certains soient obligés de rester sur le gazon pendant que d’autres ont droit à un vestiaire climatisé avec d’autres commodités. Cela peut influer forcément sur le résultat du match. A ce niveau, la démocratie se sépare du sport ; en démocratie même si on peut tout prendre, il est important de laisser une petite part à l’adversaire ; le « tukgili » inventé par le maire de Ouagadougou indique clairement son degré d’acceptation de la démocratie pluraliste.

Le CDP en appuyant trop fort sur l’accélérateur court le risque de voir son candidat élu avec un score qui ne se voyait qu’en Chine, en Union soviétique et en Corée du Nord. Là aussi, c’est pas bon ; en ce 21ème siècle, être élu à 80 ou 95% frise le ridicule et jette des soupçons sur le processus électoral et même la marche de la démocratie dans un pays. Si au lendemain du 13 novembre, Blaise Compaoré est élu avec 95% comme le disait El Hadj Djanguinaba Barro lors du meeting de lancement à Bobo-Dioulasso, nos partenaires multi et bilatéraux ne vont pas comprendre.

Blaise Compaoré a fait presque deux décennies au pouvoir. On connaît les classements du pays sur le plan du développement humain durable. La pauvreté est la chose la mieux partagée au Faso ; les affaires pendantes comme l’assassinat du journaliste Norbert Zongo et les autres crimes de sang devraient jouer un tant soit peu sur le score de Blaise Compaoré à l’élection présidentielle.
Les férus de démocratie souhaitent même un second tour pour crédibiliser davantage le processus démocratique au Faso.

Mais là, c’est un jeu auquel ne veulent pas participer les bonzes du CDP. Ils veulent plutôt une victoire totale et entière ; le grand manager de la campagne parle même de plébiscite ; donc un 98% des voix ne le gênerait nullement ; alors que cela rappelle plutôt le temps des pères de l’indépendance et l’époque de Kim Il Sung.

Le CDP court derrière un fort taux de participation et un fort taux pour son candidat. Cela d’autant plus que les querelles internes au parti poussent le directeur de la campagne Salif Diallo, à mettre les bouchées doubles pour écraser les mécontements dans la famille qui voient en sa position de grand patron de la campagne une façon de renforcer encore plus sa position de vrai "homme" du président.

C’est un challenge pour lui car une toute petite erreur dans la machine électorale sera exploitée à fond dans la maison pour le discréditer auprès de Blaise Compaoré, l’objet de toutes les convoitises. Il lui faut donc prouver qu’il mérite la confiance du président et que les autres n’ont qu’à bien se tenir.

C’est cette lutte sur plusieurs fronts qui poussent le CDP à utiliser des munitions aptes à tuer les éléphants pour fusiller des perdrix et même des moineaux. La dernière interview de Mélégué Traoré à Sidwaya indique clairement qu’au CDP, les mécontents se comptent à la pelle.

Par Kassim Kongo
Bendré

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