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Me Sankara à Nassoumbou (Soum) : "Je veux transformer le Sahel, comme les Israéliens, le Néguev"

Publié le lundi 31 octobre 2005 à 07h56min

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Décidément Me Bénéwendé Sankara va là où son héros de référence, Thomas Sankara, a posé des actes majeurs durant son existence : après Gaoua, ville qui a bercé l’enfance du président du CNR, et où il a lancé l’appel de Gaoua sur l’éducation, voilà le candidat de l’UNIR/MS à Nassoumbou (à 14 km de la frontière du Mali), pour son second meeting.

C’est dans ce département qu’en 1974, le lieutenant... Thomas Sankara a érigé son QG et a fait le coup de feu contre des soldats maliens lors de la première "guerre des pauvres" (Burkina # Mali).

Parties à 8h 30 en ce jeudi 27 octobre du siège de l’UNIR/MS, sis aux 1200 Logements, la délégation prendra la route de Djibo en passant par Kongoussi. Arrêt d’abord à Gaskindé, un village de Pobe-Mengao, situé à 25 km de Djibo. Dans cette localité peuplée essentiellement de Peuls Rimaébé, Me Sankara fera un speech de 30 mn. Avant son intervention, le représentant local du parti de "l’œuf" souhaitera bonne chance à leur champion et surtout, s’il "gagne le pouvoir, qu’il sache le gérer".

Quant à Me Sankara, il a tout simplement décliné le sens de son combat aux "Gaskindais" : "Que peut-on souhaiter pour son peuple sinon le bonheur ? A l’UNIR/MS nous considérons que la politique a pour finalité le bien de la cité", dira-t-il.

En fidèle disciple de Platon, le patron, de l’UNIR/MS ajoutera que la politique est indisociable de la pratique quotidienne des valeurs cardinales (du juste, du beau, du bien, du vrai). Me Sankara finira en martelant cette phrase : "Blaise a passé 18 ans au pouvoir... il est venu par la force des fusils... si les Burkinabè ne mettent pas à un terme à ce pouvoir qui n’a que trop duré, les lendemains seront durs".

En reprenant la route vers Djibo, premier couac avec une crevaison du véhicule du député Derra Adama. Arrêt forcé de plusieurs minutes pour changer le pneu. A l’entrée de Djibo, la délégation était attendue par la coordonnatrice de l’UNIR/MS du Sahel, Mme Kadidia Dicko, et de quelques militants du chef-lieu de la province du Soum.

En repartant de Djibo, après une halte-repos à 14h, nous étions loin de nous imaginer que les 38 km qui séparent Nassoumbou de Djibo allaient nous prendre 2 heures. Pourtant, ce fut le cas. Sous la conduite de la coordonnatrice Dicko, les véhicules qui composaient la délégation furent cahotés par le sable, les trous et les marécages pendant 2 heures, avec un embourbement et une crevaison à 14 km de Nassoumbou.

A 16h 10, le cortège fera son entrée dans ce département du nord, accueilli par des militants à coups de mousquets. C’est la place du marché de Nassoumbou qui a servi de cadre à ce raoût politique de l’UNIR/MS. Après une introduction du traducteur, Bedari Tamboura, la coordonnatrice du Sahel, Kadidia Dicko, s’adressera aux militants du parti dans la langue du terroir, c’est-à-dire en poular. Elle affirma en substance que la formation politique dont elle est membre est celle de l’avenir. L’UNIR/MS vise, selon elle, le bien-être des populations, surtout celles des zones "délaissées" tel le Sahel.

Selon Kadidia Dicko, il faut que les habitants de Nassoumbou sortent nombreux le 13 novembre prochain faire le bon choix : voter pour Me Bénéwendé Sankara. S’en suivront un véritable réquisitoire contre les tenants actuels du pouvoir d’Etat, qui n’ont pas pu résorber les maux qui minent la société burkinabè et qui ont pour noms : pauvreté, chômage, faim...

Guilou Koussoubé, premier tué de 74

Avant de s’adresser à ses ouailles du Sahel, Me Sankara chargera le traducteur Bedari Tamboura d’expliquer le pourquoi du choix de Nassoumbou. Ce que fera ce dernier qui, il faut le dire, a dû bagout. Un peu de cours d’histoire : en 1974 éclata le premier conflit frontalier entre l’ex-Haute-Volta et le Mali.

Les premières escarmouches mortelles eurent lieu dans cette partie du Burkina. Une partie qui est très vaste puisqu’elle s’étend jusqu’à l’ouest du pays. C’est donc à Nassoumbou, que choisit Thomas Sankara, alors lieutenant, d’installer sa section. De ce QG, il fera le déploiement dans les recoins de la zone pour combattre l’ennemi malien (NDLR : selon certains, ce fut un acte d’indiscipline de Thomas Sankara).

C’est au cours d’un accrochage entre soldats maliens et burkinabè que fut tué Guilou Koussoubé, un soldat valeureux dont le sacrifice suprême (mort pour la patrie) a inspiré de nombreuses chansons en hommage à sa mémoire. Il fut d’ailleurs le premier tué de cette première guerre entre l’ex-Soudan français et l’ex-Haute-Volta. Un arrêt sur la guerre de 74, que reprendra le président de l’UNIR/MS quand il s’adressera à la foule venue l’écouter.

Attaché aux symboles (par exemple le serment sur la tombe de Tom Sank le 15 octobre 2000), il ne pouvait ignorer cet acte de son héros, qui date d’il y a 31 ans : Nassoumbou demeure un site historique pour les sankaristes, dira-t-il. "Vous vous souvenez que le président Thomas Sankara a séjourné ici en 74 ?" questionna l’orateur. "Oui, oui", répondit en chœur la foule, avant de dire "kellé, kellé : applaudissez ! applaudissez !" en poular. Pour Me Sankara, le combat de Sankara à l’époque pour défendre l’intégrité territoriale de son pays est un acte de bravoure, mais aussi de paix, ce qui avait (déjà) révélé l’homme aux Voltaïques.

Programme alternatif sankariste : combat contre la pauvreté

Cependant et comme son héros n’avait cessé de le dire, le véritable combat n’est pas de faire la guerre, mais de lutter contre la pauvreté. C’est pourquoi le patron de l’UNIR/MS estime que le programme alternatif sankariste, qu’il propose, est une solution pour vaincre cette pauvreté endémique qui est le lot quotidien des Burkinabè. En pages 10 et 11 de ce programme, on peut lire que"l’expérience sankariste de lutte contre la pauvreté ou l’auto-ajustement du Burkina (1983-1987) peut aujourd’hui, sans complexe, se targuer d’avoir réussi là où les politiques économiques pensées et conçues à Washington ont échoué...".

En page 25, s’agissant du monde rural, l’UNIR/MS énumère les performances réalisées par le Programme populaire de développement (PPD) : priorité à l’agriculture et à l’élevage : 44% des investissements ont été consacrés à ces volets. "Les effets de cette politique sont encore perceptibles aujourd’hui : 815 retenues d’eau stockant 4,5 milliards de m3, irriguant 16 750 ha de plaines et de bas-fonds... Le PPD a été relayé par le plan quinquennal de développement populaire (PQDP) durant la période 1986-1990...

Environ 42% des investissements du PPD furent exécutés au profit du monde rural...". Comparaison n’est pas raison, mais Me Sankara pense que si les Israéliens ont pu transformer leur désert, le Néguev, en terre promise, il est possible aussi de faire du Sahel burkinabè une terre fertile : " à Nassoumbou et dans tout le nord désertique, cela est du domaine du réalisable.

(NDLR : par la méthode du goutte à goutte, les Juifs d’Israël sont arrivés à transformer un territoire aride en oasis fertile. A partir notamment du Jourdain (une des raisons de l’occupation et des causes de la guerre avec les Palestiniens), Israël, de nos jours, a de l’eau qui satisfait ses besoins. "Je ne suis ni Moïse, ni un prophète, mais ensemble on peut réaliser ces projets au Sahel..." ajoutera-t-il.

"La gomme arabique est un échec"

Abordant le bilan des années Compaoré, le visiteur d’une journée à Nassoumbou dira qu’il est sombre et qu’il est inutile d’égrener les échecs du pouvoir en place. Chaque Burkinabè, selon Me Sankara, subit tous les jours les conséquences de cette incompétence de la IVe République. "Les grèves des 26 et 27 octobre attestent que les citoyens sont fatigués de ce pouvoir". Pour lui, "Le Sahel a été abandonné par Blaise Compaoré et son gouvernement" .

Tout en fustigeant le détournement de vivres par certains responsables, il a réaffirmé son intention, s’il est élu, d’œuvrer à l’amélioration du couvert végétal dans le Sahel. Il s’est inscrit en faux contre le projet gomme arabique, qui avait suscité beaucoup d’espoir, mais qui, au finish, a fait "flop". "Combien de milliards a-t-on utilisé pour cette gomme arabique ?" Quid des retombées bénéfiques de ce projet ? demanda-t-il en substance. Selon lui, il n’y a pas eu de bilan du projet lequel est un échec.

Enfin conlura-t-il son speech, il faut que chaque militant de l’UNIR/MS sache que seul le peuple burkinabè est maître de son destin et que si l’UNIR/MS est allée jusqu’à Nassoumbou, c’est parce que "le pied va là où il y a le cœur", selon un proverbe nigérien. Il se dit convaincu que seule la vérité compte dans toute action humaine, or, que ce soit dans "la Bible ou le Coran, l’œuf est symbole de bien, de vérité". Signalons que le 28 octobre à savoir le lendemain du déplacement de Nassoumbou, Me Sankara a rencontré ses militants des petits marchés de Pissy et Signoghin à Ouagadougou.

Zowenmanogo Dieudonné Zoungrana
Observateur Paalga

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