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La pétanque féminine au Burkina : Cinq dames décidées à briser les tabous

Publié le vendredi 14 mai 2021 à 22h25min

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La pétanque féminine au Burkina : Cinq dames décidées à briser les tabous

L’univers du jeu de boules est dominé par les hommes au Burkina. Cependant, une dame du nom de Aguératou Ganamé, plus connue sous le sobriquet de « Adji national », est parvenue à s’y intégrer. Depuis 2013 qu’elle joue, elle se bat comme elle peut afin de rallier d’autres femmes à elle. Pour ce faire, elle quitte de fois sa casquette de joueuse, pour revêtir celle de promotrice, en lançant une coupe dénommée « Ganamé Aguératou ». Sa coupe est à sa 4e édition et s’est tenue le 11 avril 2021 à Ouagadougou, sous le thème, « Mobilisation de la gent féminine autour du sport ». Elle se fixe pour objectif la mise en place de dix triplettes féminines d’ici à l’horizon 2025.

Elles ne sont que cinq femmes pour l’instant qui jouent à la pétanque : Aguératou Ganamé dit Adji national (club Zunoogo), Marie-Madeleine Somda (AS DGI), Florence Kanzié (Espoir pétanque Gounghin), Zeinabou Ouédraogo (club Buayaba), et Alliance Safiatou Ramdé (club Baobab Koudougou). Aguératou Ganamé est sans conteste la pionnière du jeu de boules au Burkina.

Venue dans le milieu par curiosité, elle ne croyait pas qu’elle y resterait pendant huit ans. « Je suis venue à la pétanque par le plaisir de regarder d’abord, par la suite en 2013, j’ai essayé et ça donnait et les gens m’ont encouragée », explique-t-elle comme genèse de son arrivée dans le cercle. Du plaisir de jouer, elle est devenue une excellente joueuse unanimement reconnue dans la pétanque avec un palmarès qu’elle peut brandir. « J’ai pris des trophées que des hommes ont joué des décennies durant sans les avoir, un trophée prisé qu’est la coupe de la ligue du Centre, la coupe LONAB, la coupe Nebnoma 14, et j’ai été finaliste dans plusieurs concours », confie-t-elle. Et c’est justement ces succès qui l’ont poussée à jouer jusqu’à nos jours.

Aguératou Ganamé, c’est la pionnière de la pétanque féminine, elle se bat comme elle peut, pour amener d’autres femmes dans la discipline.

En dépit des réussites qu’elle glane, Adji se sent esseulée dans un univers d’hommes, d’où l’idée de lancer une coupe. « J’ai remarqué l’absence de femmes dans la pétanque, je me suis dit pourquoi ne pas encourager d’autres dames à venir se joindre à moi, pour qu’ensemble nous menions la lutte, pour relever le défi, car une seule main ne peut ramasser la farine », constate-t-elle pour justifier la création de sa coupe. Lentement mais sûrement, selon elle, l’objectif est en train d’être atteint, car elle a été seule pendant des années, mais depuis trois ans, quatre autres femmes sont venues s’ajouter à elle, et elles sont maintenant cinq.

Marie-Madeleine Somda, elle évolue à l’AS DGI pétanque, elle a été ancienne arbitre internationale de football.

Adji elle fixe alors un objectif, la création de dix triplettes féminines d’ici à l’horizon 2025. En ce moment, les femmes aussi compétiront entre elles, et auront leur championnat à part entière comme on en voit dans d’autres disciplines. Tout comme leur locomotive Adji, les autres femmes sont aussi arrivées dans le milieu de la pétanque par le plaisir d’abord. Martine-Madeleine Somda, agent de la Direction générale des impôts (DGI), a intégré en fin de compte l’équipe de pétanque de son service AS DGI. De même, Florence Kanzié, qui exerce le métier de valet de chambre, c’est de retour de l’école, elle a vu les jeunes du quartier en train de jouer, elle s’est essayée en faisant quelques pointages, et c’est ainsi que c’est parti, elle intégrera par la suite le club Espoir pétanque de Gounghin.

Zeinabou Ouédraogo est élève et joue au club Buayaba.

Zeinabou Ouédraogo, élève en classe de 1re a aussi piqué le virus dans le quartier en regardant les gens jouer. Elle a pris goût et intègrera par la suite le club Buayaba. C’est la même chose pour Safiatou Ramdé de Koudougou, aussi élève de son état. Dans leurs clubs respectifs, elles sont les seules femmes. Comment se sentent-elles dans le milieu des hommes ? « Je me sens comme tous les autres joueurs, je ne me prends pas pour une femme, je suis une joueuse redoutable pour tout le monde, même dans la composition des équipes, il faut que je choisisse ceux-là avec qui je veux jouer, je ne me laisse pas faire, quand je vais à un concours, je me dis ce que les hommes font, moi je peux le faire, et tous ceux-là qui me croisent le savent bien, il faut jouer pour gagner, sinon ce n’est pas pour prendre des points cadeaux », martèle Adji. Florence Kanzié, elle dit se sentir au milieu des hommes.

Florence Kanzié est sociétaire à Espoir pétanque de Gounghin.

« Là où il y a garçons, je suis là-bas, c’est mon style », dit-elle, mais sa collègue Zeinabou Ouédraogo, soutient qu’il faut en tant que femme, avoir un mental fort, pour évoluer au milieu des hommes. Pour Marie-Madeleine Somda, elle fait comprendre qu’elle n’a pas de difficultés particulières au milieu des hommes. « Je me sens bien au milieu des hommes, le sport c’est mon dada, je suis ancienne arbitre internationale de football, donc je suis toujours dans le milieu des hommes, je suis habituée », indique-t-elle.

L’avenir de la pétanque féminine, elles y croient

Malgré les pesanteurs sociales qui font que certaines femmes, bien qu’elles aiment la discipline, hésitent à s’engager, elles ont fois en l’avenir de la pétanque féminine. Zeinabou explique que quand elle s’est engagée, certaines filles la regardaient d’un certain œil, mais aujourd’hui, elles sont revenues à de meilleurs sentiments et veulent même la rejoindre. Marie-Madeleine, elle, a foi que dans les années à venir, on entendra parler des Etalons boulistes. Elle laisse même entendre qu’ayant déjà exercé dans l’arbitrage du football, il n’est pas exclu qu’elle cherche à se spécialiser pour devenir arbitre de pétanque. Florence, elle, pense que si elles gagnent même deux équipes de triplettes, c’est bon en attendant de voir le nombre grossir, et de rappeler que dans le concours du jour, les hommes qui les ont croisées, ont souffert avant de les battre, le jeu était à égalité 8-8.

La Fédération burkinabè de pétanque encouragera le jeu des femmes

De l’avis de Macaire Kaboré, président de la Fédération burkinabè de pétanque (FBP), la pétanque féminine se porte bien, parce que de plus en plus, de jeunes dames s’intéressent à la discipline. Selon lui, c’est un sport populaire, accessible à tout le monde, hommes, femmes, jeunes, enfants. Il a avancé que pendant le mandat fédéral, la FBP va encourager les présidents de clubs à promouvoir la pétanque féminine. « Par le passé, il y avait des équipes cent pour cent féminines. L’AS Poste avait une équipe féminine avec environ une dizaine de femmes, il y avait aussi l’école de pétanque où des filles étaient encadrées, malheureusement cela n’a pas duré longtemps », rappelle-t-il.

Le président de la Fédération burkinabè de pétanque, Macaire Kaboré, invite les présidents de clubs à promouvoir le jeu des femmes.

Il explique cela par le fait que les parents ne comprennent pas, ils n’ont pas une bonne image, mais avec la sensibilisation, le soutien, l’accompagnement de la presse, avec le temps, les parents comprendront.

Eugène Taonsa, président de l’AS Poste confirme bien qu’entre 2014-2016, La Poste avait deux triplettes féminines et elles ont même participé à un championnat au Bénin qu’elles ont remporté. Il explique que La Poste qui est très compétitive sur l’échiquier national chez les hommes, n’a plus de section féminine. Cela est dû à l’instabilité, les changements de situation matrimoniale, mariage, et le mari qui ne veut plus que madame continue à jouer, maternité, etc., et l’équipe se voit disloquée, ce n’est pas facile, fait-il remarquer, avec les femmes.

Barthélemy KABORE

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Vos commentaires

  • Le 15 mai 2021 à 08:45, par Kouda En réponse à : La pétanque féminine au Burkina : Cinq dames décidées à briser les tabous

    Bravo et courage à vous, mesdames.
    C’est un sport et un passe-temps comme tous les autres sports. Il n’y a alors aucune gêne ou stigmatisation que des femmes pratiquent le sport de la pétanque puisqu’elles pratiquent déjà le judo, le volley-ball, le football, l’athlétisme...

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