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Marche de soutien aux dialysés et insuffisants rénaux : Le SOS de Yiyé Constant Bazié

Publié le mercredi 21 avril 2021 à 23h10min

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Marche de soutien aux dialysés et insuffisants rénaux : Le SOS de Yiyé Constant Bazié

Afin de soutenir les personnes souffrant d’insuffisance rénale et sous dialyse dans leur lutte pour l’accès à des soins appropriés, Yiyé Constant Bazié a organisé ce mardi 20 avril 2021, une marche. Accompagné par plusieurs adhérents à la cause, il a parcouru environ 13 km dans la ville de Ouagadougou afin d’attirer l’attention des autorités sur les difficultés que rencontrent au quotidien les personnes dialysées. Dans sa démarche, il a bénéficié du soutien de plusieurs Burkinabè qui ont également marché dans plusieurs villes du pays et même au-delà de nos frontières. Dans cet entretien qu’il nous a accordé, Yiyé Constant Bazié revient sur les difficultés liées à l’accès à la dialyse au Burkina Faso et fait des propositions pour l’amélioration des conditions de soins des malades.

Lefaso.net : Qu’est-ce qui vous a incité à initier cette marche de soutien aux insuffisants rénaux et personnes dialysées ?

Yiyé Constant Bazié : Entendre parler d’un insuffisant rénal ou d’un dialysé donne à réfléchir. Un insuffisant rénal doit débourser dans le privé 90 000 FCFA par séance de dialyse et il en faut trois par semaine. Ce qui fait 270 000 FCFA par semaine et 1 080 000 FCFA le mois. Et quand on sait que le SMIG au Burkina Faso c’est à peu près 37 000 FCFA, et que peu de travailleurs touchent au moins 500 000 FCFA, cela signifie que tout son salaire ne suffirait même pas pour assurer les trois dialyses par semaine ni tout le mois. Autant le dire que quand il y a un dialysé dans la famille, c’est comme le regarder mourir.

Pour ce qui est du public, il faut d’abord déposer une caution de 500 000 FCFA et s’inscrire ensuite sur une liste. Et la liste des dialysés comprend actuellement, le double des patients qui reçoivent effectivement les soins appropriés. Il y en a qui sont arrivés au stade où, c’est triste de le dire, mais ils prient pour que des gens qui sont traités de façon régulière décèdent pour qu’ils puissent avoir accès à la dialyse dans le public.

C’est déjà un état de stress, sans parler des examens quotidiens et des suites de dialyse. Parce qu’à la suite des dialyses, il peut y avoir des complications. Il faut aussi porter le cathéter sur soi permanemment. Ce qui est en soi déjà une épreuve pour ceux qui souffrent d’insuffisance rénale et pour leurs accompagnants. Au regard des difficultés rencontrées par les personnes souffrant d’insuffisance rénale, nous avons décidé d’organiser une marche afin d’attirer l’attention sur leur situation.

Les marcheurs

Comment s’est passée la marche de façon concrète ?

Nous avons organisé une première marche le 8 avril, pour dire merci au président de l’Assemblée nationale pour les efforts qu’il fait de façon discrète. La deuxième marche a eu lieu le 20 avril. Elle est partie du rond-point des cinéastes jusqu’au croisement des bureaux de la chaîne de télévision BF1 ce qui fait 13 km. Ça été une marche de relais. Et dans le symbole nous avons voulu que le tronçon soit confié à une personne parce que le malade souffre seul avec sa famille.

C’est pourquoi nous n’avons pas cherché à faire dans la pléthore de personnes, car l’objectif visé n’était pas de rassembler un grand monde mais plutôt de faire passer le message et d’interpeller. Et ceux qui nous ont accompagnés sont à féliciter car ils ont pu transmettre le message. Certains sont sortis marcher à Pô, à Nouna, à Bobo-Dioulasso et à Manhattan aux États-Unis. Ce qui nous encourage dans notre démarche qui vise à interpeller l’autorité pour qu’elle se penche plus sur la situation des insuffisants rénaux.

Qu’est-ce qui peut être fait selon vous par les premières autorités, en vue d’améliorer la prise en charge des insuffisants rénaux ?

Il faut d’abord faire baisser les coûts de la dialyse et les ramener à zéro. Nous comptons au Burkina Faso entre 700 et 1000 dialysés. Si le gouvernement décidait aujourd’hui de les prendre entièrement en charge, cela fait à peu près 13 milliards de FCFA. Et c’est un montant qui, à notre avis, est dans les cordes de l’État burkinabè. Et cela va certainement aider les malades à souffler, ne serait-ce que financièrement.

Les marcheurs d’autres localités du pays

Le deuxième point concerne le nombre des appareils qui est limité, ce qui fait que même si on voulait prendre en charge tous les insuffisants rénaux, cela ne serait pas possible en l’état actuel des choses. Il faut qu’il y ait plus d’appareils de dialyse fonctionnels pour pouvoir soulager les malades. Il faut aussi mieux former les agents de santé pour cet accompagnement en termes de soins, car ce n’est pas une maladie légère en termes de charge émotionnelle.

En troisième point, si on pouvait légiférer sur l’utilisation de certains pesticides, herbicides et engrais. Nous avons par exemple le glyphosate qui est très mauvais et qui attaque le foie et les reins. Il est interdit en Europe mais continue de circuler dans nos pays. Et si rien n’est fait, ce sera une catastrophe. La preuve est que nous avons même des enfants en bas âge qui souffrent d’insuffisance rénale. Il faudrait peut-être légiférer sur les conditions d’utilisation et d’importation de ces pesticides et herbicides, pour qu’il y ait un mécanisme de contrôle et de sanction afin de protéger le Burkinabè lambda.

Après la marche du 20 avril, est ce que des actions sont envisagées dans les jours à venir, toujours en faveur des insuffisants rénaux et dialysés ?

Nous allons réfléchir sur la nécessité de nous constituer en personne morale. Cela peut aider car nous avons constaté que notre voix porte. Ça ne va pas forcément nous donner plus de poids mais permettre à certaines personnes qui souhaitent nous aider à le faire plus facilement pour des raisons administratives et autres. Nous continuons la réflexion mais ce n’est pas notre objectif principal. Notre objectif est de porter des luttes qui vont bénéficier à la plupart des citoyens.

Bonaventure Zongo a marché à Manhattan pour soutenir les insuffisants rénaux

Avez-vous un dernier mot ?

Nous restons engagés dans la lutte, tant qu’il y aura quelque chose à faire ou à proposer pour améliorer la situation des insuffisants rénaux. Quelque soit la lutte que l’on mène on se fait souvent insulter, mais il faut accepter tout cela et aller de l’avant. Il faut savoir s’oublier pour les autres, afin qu’en d’autres lieux d’autres personnes également s’oublient pour nous. C’est comme la marche du 20 avril, c’est comme une marche de relais. Nous faisons le relais aujourd’hui et demain d’autres le font pour nous.

Propos recueillis par Armelle Ouedraogo
Lefaso.net

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