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Artisanat : Instituteur de formation, Abdoulaye Ouattara fait de la teinture sa passion

Publié le vendredi 12 février 2021 à 22h29min

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Artisanat : Instituteur de formation, Abdoulaye Ouattara fait de la teinture sa passion

Abdoulaye Ouattara est un instituteur dans la commune rurale de Boussé, dans la province du Kourwéogo, région du Plateau-central. Résident de la ville de Bobo-Dioulasso, à ses temps perdus, il encadre également des jeunes dans la dance chorégraphique et exerce le métier de teinturier qui est devenu aujourd’hui sa passion. Persuadé du potentiel de ce métier et que la réussite passe également par la passion, Abdoulaye Ouattara nourrit le rêve un jour d’ouvrir un centre de formation en teinture afin d’aider ses jeunes frères et sœurs du quartier.

Abdoulaye Ouattara fait partie des personnes qui considèrent que toute expérience est bonne à prendre. Véritable combattant, ses qualifications et sa polyvalence lui permettent aujourd’hui d’être considéré à lui seul comme une « entreprise humaine ». Pour ses proches, c’est un jeune qui a compris qu’il n’y a pas de sot métier. Selon lui, « tout métier nourrit son homme et il suffit de le prendre au sérieux et avec rigueur », dit-il.

Abdoulaye Ouattara en pleine formation de ses jeunes frères du quartier

Instituteur de formation, maitre chorégraphe, teinturier, sont entre autres les métiers qu’exerce Abdoulaye Ouattara. Sa passion pour la teinture émerge alors qu’il était en classe de 4e et ce, grâce à une de ses tantes. « J’ai appris les B.A BA du métier de teinturier grâce à une tante qui, à l’époque, m’avait inscrit chez Moumouni Ouédraogo (dit Moon), qui est aussi un grand teinturier de la ville. Lorsqu’elle m’a fait la proposition, je n’ai pas hésité une seule seconde à prendre part à la formation. C’est ainsi que j’ai pu intégrer le domaine de la teinture aujourd’hui », a-t-il relaté.

L’enseignant-teinturier accompagné des apprenants du quartier après formation

A l’en croire, l’apprentissage a été un long processus parsemé de difficultés. Environ huit ans, c’est le nombre d’années qu’il a fait chez Moumouni Ouédraogo afin de se perfectionner et aussi de pouvoir s’installer à son propre compte. Il apprenait ce métier pendant les vacances scolaires puisqu’il continuait les cours jusqu’en classe de terminale. « Après ma terminale, je n’ai plus fréquenté encore. J’ai fait deux ans à l’Ecole nationale des enseignants du primaire à titre privé. C’est à l’issue de cette formation que l’année qui a suivi, j’ai tenté ma chance au concours de la fonction publique. J’ai été admis au concours de l’ENEP. Donc je suis reparti encore à l’école pour deux années de formation encore », confie Abdoulaye Ouattara.

Abdoulaye Ouattara en train de former les jeunes du centre

C’est ainsi qu’il arrive à embrasser le métier d’instituteur après quatre années de formation à l’ENEP de Loumbila. Cependant, il affirme que cela n’a pas été facile de concilier son métier d’enseignant à celui de teinturier. « Au début cela n’a pas été facile puisque je ne voulais pas abandonner le métier de teinturier. C’était devenu ma passion. Etant dans la fonction publique, il fallait aussi respecter la déontologie. Avec le métier d’instituteur, certes, les vacances ne sont pas faites pour l’enseignant, mais il faut dire qu’à mes temps perdus, j’essaie de jongler pour pouvoir faire ce métier. Ce n’est pas simple mais on essaie de s’accrocher », a-t-il fait savoir.

L’une des productions de l’enseignant Ouattara

Enseignant dans un centre d’éducation de base non formelle

C’est cette passion pour la teinture qui l’amena plus tard au Centre d’éducation de base non formelle (CEBNF) de Boussé en tant que formateur. Abdoulaye Ouattara a ainsi su montrer une détermination au point que son inspecteur, Alexandre Ouédraogo, a décidé de l’affecter dans ce centre de formation. « Je suis présentement instituteur dans un Centre d’éducation de base non formelle (CBNEF). Là-bas nous formons les enfants aux métiers. Et j’ai été affecté dans ce centre comme un teinturier. Ce qui fait que je suis plus vu dans le métier de teinturier que d’instituteur aujourd’hui. Au début cela n’a pas été simple surtout avec les apprenants. Pour leur formation, nous avons une phase théorique et une phase pratique. Dans la théorie, nous leur apprenons à faire les mélanges de couleurs et nous leur montrons les différents tissus qu’on peut teinter notamment le bazin, le tissus simple, la soie, etc. Après nous passons à la pratique », explique-t-il.

Abdoulaye Ouattara en pleine séance de cours avec ses élèves

Ces dernières années, Abdoulaye Ouattara a su développer ses compétences à travers la création de nouveaux designs sur tous supports, notamment sur du bazin ou sur diverses qualités de tissu pour des événements nationaux ou internationaux. Pour sa part, tout métier pris au sérieux nourrit son homme. « C’est une question d’organisation », a-t-il renchérit. Abdoulaye Ouattara fait sien cette pensée qui dit que « lorsque tu n’es pas né avec une cuillère d’or dans le bouge, il faut travailler à ce qu’au moins ta progéniture en bénéficie ». D’où son acharnement pour le travail.

Des productions koko-donda

Les exigences et difficultés d’un métier

A l’en croire, le métier de la teinture a aussi ses exigences et difficultés. « D’abord il faut savoir que les produits que nous utilisons sont beaucoup plus toxiques. Donc nous nous protégeons pour ne pas qu’à la longue ces produits nous causent des problèmes. Du coup, nous essayons aussi de protéger les populations en évitant qu’ils soient en contact avec nos eaux usées. Pour faute de moyen, nous avons un problème de site pour travailler. Qui parle de site, parle d’un coin bien aménagé pour pouvoir faire le travail. Aussi, nous sommes confrontés à un problème de contrefaçon. Chaque fois que nous créons, il y a toujours des gens qui trouvent moyens d’imiter. Après, ils nous ramènent ça à moindre coût et cela casse nos prix », a-t-il déploré.

Des productions de pagne koko-donda de l’enseignant

Par ailleurs, Abdoulaye Ouattara dit avoir des projets dans le futur. En effet, notre instituteur ambitionne d’ouvrir un centre de formation en teinture à Bobo-Dioulasso, afin de venir en aide, selon lui, aux frères et sœurs du quartier qui désirent apprendre ce métier. « Je souhaiterai vraiment ouvrir ce centre un jour afin de pouvoir former les jeunes. Actuellement les gens voient plus la fonction publique. Certes, la fonction publique est comme un abri, mais si tu arrives à faire quelques choses de tes doigts, c’est encore meilleur. Il n’y a rien de tel », s’est-il convaincu.

Toutefois, il lance un appel à l’endroit de tous les jeunes qui désirent apprendre ce métier, à ne pas hésiter car dit-il, « je suis ouvert à tout le monde ».
A ses temps perdus, il encadre également dans la danse chorégraphique, surtout ses élèves lors des manifestions de jouissance (nuits culturelles). Aussi, il est sollicité pour des chorégraphies lors des cérémonies de mariage.

Romuald Dofini
Lefaso.net

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